Le contrat de génération : panacée ou écran de fumée ?

Le contrat de génération : panacée ou écran de fumée ?

L’idée du contrat de génération est simple : faire davantage de place aux plus jeunes sans pousser dehors les plus anciens.

Un pari audacieux !

Concrètement, si une entreprise de moins de 300 salariés embauche un jeune tout en maintenant un senior en place, elle aura droit à un allègement de charges sociales. Ce projet part d’un constat. Dans nos belles contrées françaises, 25% de jeunes sont touchés par le chômage.

Les seniors (plus de 55 ans) quant à eux, ont un taux de chômage faible de 6,5%. Mais le problème pour un senior, c’est retrouver un emploi quand il perd le sien ! Car les entreprises françaises restent très frileuses pour embaucher un senior. Le contrat de génération a l’ambition de répondre à cette double contrainte.

Alléchant sur le papier, je vous propose d’éclaircir ensemble les enjeux et les dessous de ce projet.

Enjeux du contrat de génération

Le contrat de génération pose 4 enjeux majeurs pour les entreprises et la société :

  • Favoriser l’insertion des jeunes sur le marché du travail. Faire baisser la précarité et le taux de chômage chez les jeunes. Actuellement seulement 1 jeune sur 2 est en CDI.
  • Maintenir ou recruter des seniors. Le savoir-faire et l’expérience acquise au fil des années par les salariés les plus anciens doivent être mieux valorisés.
  • Encadrer la transmission intergénérationnelle des savoirs et des compétences. Le départ à la retraite entraîne une perte de connaissances et de compétences pour l’entreprise. Il faut encourager et permettre la transmission de ce savoir vers les nouveaux arrivants.
  • Avoir une mixité intergénérationnelle dans l’organisation. Les équipes mixant les générations sont plus efficaces. Les différents regards permettent en effet de mieux comprendre et régler les problèmes. La créativité et donc l’innovation sont améliorées.

Détails du contrat de génération

Le contenu définitif du contrat de génération n’est pas encore connu. Une fois le projet de loi voté, toutes les embauches réalisées depuis le 1er janvier 2013 seront éligibles au contrat de génération. On peut d’ores-et-déjà dessiner les contours du contrat de génération.

Public concerné

  • Jeunes de moins de 26 ans (30 ans si handicapés) recrutés en CDI. Typiquement la génération Y.
  • Seniors de plus de 57 ans déjà dans l’entreprise (55 ans si handicapés ou embauchés). Autrement dit les baby-boomers.

Entreprises de moins de 300 salariés (soit 56% des entreprises)

En échange de la signature d’un contrat de génération, l’état les aidera financièrement sous forme d’un allègement de charges sociales. Et ce jusqu’à 12 000 € sur 3 ans.

Entreprises de plus de 300 salariés

Elles devront présenter obligatoirement un plan ou un accord en relation avec le contrat de génération pour le 30 septembre 2013. Un décret précisera ultérieurement son contenu. Si pas de plan, des sanctions financières s’appliqueront.

Objectif

L’objectif affiché par le gouvernement est clair : 500 000 embauches de jeunes sur 5 ans dans les entreprises de moins de 300 salariés, et des améliorations pour les 1,2 million de jeunes et seniors concernés par les accords dans les plus grandes entreprises. Ambitieux, n’est-ce pas ? D’autant plus qu’on ne vous dit pas tout sur ce fameux contrat de génération…

Ce que l’on ne vous dit pas sur le contrat de génération

En regardant sous la ligne de flottaison et en poussant plus loin l’analyse :

  • Les sanctions prévues ne sont en rien dissuasives pour certaines entreprises qui ont les moyens financiers de se mettre au-dessus des lois, à l’image des aides et des sanctions prévues pour l’embauche des travailleurs handicapés.
  • Cette transmission de connaissances entre le senior et le jeune n’aboutira à aucune qualification ou certification officielle pour le jeune. Dans un pays comme la France où le diplôme tient malheureusement encore une si grande importance aux yeux des recruteurs, les jeunes les moins qualifiés ne seront que peu aidés par cette mesure
  • Les entreprises de nouvelles technologies sont les plus dynamiques en termes de recrutement. On peut penser qu’elles vont profiter de l’aubaine du contrat de génération. C’est oublier que les seniors sont sous représentés dans ces entreprises. L’impact du contrat de génération sera donc limité.

Mais alors, le contrat de génération, a-t-il une chance de parvenir à ses fins : embaucher des jeunes en gardant les anciens ? Oui, peut-être… A condition de le mettre en place mais pas n’importe comment !

Les clés de succès du contrat de génération

Afin de mettre toutes les chances du côté du contrat de génération, les éléments suivants aideront certainement :

  • Les directions d’entreprise doivent prendre conscience des enjeux de la transmission des connaissances. Le savoir-faire des salariés représente la plus grande valeur de l’entreprise. Les patrons doivent en avoir la conviction et inclure cette dimension dans leur stratégie d’entreprise.
Contrat de génération

A gauche, une organisation hiérarchique traditionnelle. A droite, une organisation en réseau « typée » génération Y

  • Les managers ont une responsabilité dans l’application des contrats de génération. Ils doivent encourager leurs membres de différentes générations à coopérer ensemble.
  • La transmission peut se faire de façon créative et ludique. Elle ne peut pas seulement être de la lecture de documents écrits. Le jeune Y et le baby-boomer doivent travailler ensemble, se parler, aller chez le client ensemble, participer aux mêmes réunions, etc. Bref créer une vraie relation où la confiance s’installe !
  • L’entreprise doit donner envie aux seniors de transmettre. Cela est possible en valorisant leur expérience et leurs compétences, en les respectant et en leur donnant de la reconnaissance pour leur travail. Il faudra aussi les rassurer : ce n’est pas parce qu’ils vont former un jeune qu’ils vont être mis à la porte. Par ailleurs, il faut encourager un partage dans les 2 sens : le senior transmet au jeune son expérience et le jeune le forme sur les nouvelles technologies.
  • Un suivi par l’Etat de la bonne utilisation des contrats de génération par les entreprises.

En conclusion

Le contrat de génération n’est pas la panacée qui va résoudre le chômage des jeunes et l’emploi des seniors. Il a au-moins le mérite de rassembler deux générations, Y et baby-boomers, et de créer une alliance intergénérationnelle dans un rapport gagnant-gagnant : le senior transmet son expérience et le jeune embauché reçoit un apprentissage.

Par ailleurs, le contrat de génération représente un levier efficace pour renforcer la confiance et la cohésion interne dans l’entreprise. Ces 2 éléments augmentent la performance de l’entreprise.

Ce contrat va permettre à coup sûr un changement culturel, de mentalité et de représentation chez les salariés. Le management intergénérationnel prendra alors tout son sens. Reste une inconnue : est-ce que les entreprises joueront le jeu ?

Pour aller plus loin…

Je vous recommande également la lecture de cet ouvrage :

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A propos de l'Auteur

Rémi Renouleau est Créateur de Cohésion Individuelle et Collective. Coach, conférencier et entrepreneur, il accompagne les personnes à déployer leur extraordinaire potentiel et les équipes à fonctionner en juste cohésion. Contactez-le

3 Commentaires

  1. […] un senior qui accompagne un jeune. Ou l’inverse, par exemple pour les nouvelles technologies. Le contrat de génération est alors l’outil […]

  2. […] En entreprise, les jeunes peuvent former les plus anciens aux nouvelles technologies. Grâce au contrat de génération […]

  3. […] de la génération Y se joue la pérennité de l’entreprise. L’entreprise se doit de transmettre son savoir et son savoir-faire, des anciennes générations (surtout les baby-boomers) aux nouvelles générations (Y et même X). […]

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